Où as-tu grandi et comment ta relation avec la nature a-t-elle évolué au fil des années?
J’ai passé beaucoup de temps dehors, à interagir avec la nature, que ce soit pour attraper des salamandres, cueillir des fleurs (probablement même celles qu’il ne faut pas), m’assoir dans la mousse ou nager. Jusqu’à la semaine dernière, j’habitais en ville en continuant de m’évader aussi souvent que possible.
J’ai enfin l’impression de ne plus avoir besoin de m‘évader pour être près de la nature — elle est juste là quand je me réveille.
Qu’est-ce qui t’a attirée dans l’arrangement floral?
Les fleurs m’ont toujours intéressée. Quand j’étais plus jeune, je faisais du jardinage avec ma famille et j’ai longtemps eu envie de travailler avec les fleurs, sans vraiment savoir comment cela pourrait se matérialiser en passion ou en carrière.
Après avoir terminé l’université, j’ai ressenti un vide — je me sentais perdue et je ne savais pas trop quoi faire. J’ai commencé à travailler dans une fleuristerie où je servais du café et assez rapidement, je suis passée du côté des fleurs.
Je n’oublierai jamais la première journée où j’ai eu l’occasion de manipuler des fleurs dans la boutique — ma tâche consistait à préparer des bouquets de lavande et je me souviens avoir appelé ma mère en revenant du travail pour lui raconter.
Quand je me suis endormie, ce soir-là, les paumes imprégnées du parfum de lavande, j’ai su que j’avais trouvé ma place.
Comment tes études en philosophie influencent-elles ton quotidien?
J’ai appris à observer chaque perspective. Dans un de mes cours préférés, Philosophie de l’art, l’objectif n’était pas simplement d’étudier les objets, mais de déterminer ce qui les rendait si attrayants et de mieux comprendre pourquoi cela joue un rôle aussi important dans notre façon de fonctionner et de vivre en société. C’est de porter attention aux sentiments qui se rattachent à l’expérience de la beauté et de voir en quoi cela revêt une signification pour nous.
Que souhaites-tu exprimer à travers ton travail?
L’éphémère; un fragment de nature, dans tout ce qu’elle a de fluctuant, de vivant, de furtif. Je veux que mes bouquets soient simples, apaisants et teintés de nostalgie; je ne veux pas qu’ils soient figés ou qu’ils manquent de naturel. Je souhaite que mes créations évoquent le bois, les champs et les jardins, et je veux éviter tout ce qui aurait l’air trop rigide ou artificiel.
Quelles leçons la nature t'a-t-elle enseignée?
Tout est saisonnier. La nature m’a montré que je ne peux pas tout contrôler, que tout ne peut pas être rangé, ordonné et compartimenté. Elle m’a appris à ralentir, à me détendre, à être attentive. Elle m’a appris à aimer les choses dans tous les stades de leur vie, et à voir la beauté d’une fleur non seulement durant sa pleine floraison, mais aussi juste avant qu’elle éclose, puis à mesure qu’elle flétrit et qu’elle redevient graine. Elle m’a montré qu’on retrouve le beau partout, pas seulement lorsque tout est mis en scène.
À quel moment as-tu commencé à cueillir des champignons et comment es-tu arrivé à les intégrer dans ton travail?
La cueillette de champignons est quelque chose d’assez nouveau dans ma vie! Les fleurs me sont venues assez naturellement, c’est une sorte d’évidence. Par contre, les champignons font partie d’un monde à part, et j’en ai encore beaucoup à apprendre sur cet univers, comme tout le monde, d’ailleurs. On pourrait dire que je viens d’un milieu plutôt «mycophobe». Mes parents n’ont jamais été particulièrement friands de ce genre d’exploration et le moins qu’on puisse dire, c’est qu’ils étaient assez perplexes devant mes choix de décoration inspirés des champignons.
Néanmoins, la combinaison des fleurs et des champignons me semble tout à fait naturelle. Pendant la cueillette, je suis inspirée par les couleurs, les cosses de graines séchées et l’observation de plantes à tous les stades de leur vie. Ce qui m’inspire aussi, c’est de voir la symbiose entre certaines plantes et champignons, quelque chose que j’aime reproduire à travers mes créations.
Que vois-tu dans les paysages?
Le mouvement. L’idée des paysages est intéressante, dans la mesure où elle évoque à la fois les paysages sauvages que nous regardons de loin, mais aussi les jardins que nous entretenons et tâchons de maitriser, bien qu’il soit impossible de le contrôler totalement. Je suis inspirée par la façon dont les choses poussent par groupes, à différentes hauteurs; je suis fascinée par le fait que chaque plante peut à la fois présenter des bourgeons, des fleurs et des graines. J’aime le mouvement et l’asymétrie des choses.